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Oléna Stépaniv

par Bogdan Mytrowytch

En ce moment on parle de Nadija Savtchenko, pilote officier ukrainien capturée par les russes. C’est en pensant à elle, que cet article sur Olena fut écrit.

En effet, Oléna Stépaniv fut la première femme officier d’un régiment ukrainien, cela s’est passé pendant la première guerre mondiale. Avant de parler de cette femme remarquable, deux mots sur la situation géopolitique de l’Ukraine.

Le pays à l’aube de la première guerre mondiale était partagé entre deux empires : la Russie et l’Autriche-Hongrie. Des deux côtés malheureusement, des ukrainiens se battaient pour les intérêts des deux empires.
Néanmoins, la situation pour les ukrainiens était plus facile pour ceux qui se trouvaient dans l’empire Austro-Hongrois. Ils avaient des députés, qui les représentaient à Vienne, capitale du pays. Des associations tel que Prosvita, qui fut une association caritative, la Société Scientifique Chevtchenko, une association universitaire, pouvaient librement exister. Dans l’empire russe par contre, tout ce qui était ukrainien était réduit à néant, y compris la langue, qui était interdite en 1876 par l’ukaze d’Emsk sous Alexandre II.

C’est dans ce contexte que les ukrainiens de Galicie ont réussi à créer un détachement armé nommé « les tirailleurs de la sitch » (sitchovi strilsti). Des personnalités comme Evhen Konovaletz et Andrij Melnyk y furent des officiers. (Deux personnes qui joueront plus tard un rôle dirigeant dans le mouvement nationaliste ukrainien). Oléna Stépaniv qui connaissait Evhen Konovaletz depuis la période universitaire s’y engage. Ce qui est remarquable de sa part, car malgré les ricanements vexatoires de ses collègues militaires lors de l’engagement, elle se comportera avec grande bravoure dans les batailles contre l’armée russe, mais qui était Oléna Stépaniv ?

Oléna Stépaniv est née le 7 décembre à Vynnykiv près de Lviv, d’une famille dont le papa était un religieux gréco-catholique, il était membre de l’association Prosvita, sa maman était femme au foyer et s’occupait de trois enfants. Oléna fut adhérente de différentes associations de jeunes, tels que « le Plast » (les scouts) et l’association des étudiants. En 1912, étudiante à l’université de Lviv, elle étudia l’histoire et la géographie. Elle fut de ceux qui encouragèrent les femmes à prendre part dans la vie associative. Elle s’engagea dans l’armée en 1914…

En 1916, elle fut capturée par les troupes russes comme le fut d’ailleurs, Evhen Konovaletz et Andrij Melnyk. Elle fut déportée près de Tachkent en Ouzbékistan. Ses geoliers, les officiers russes, se comportèrent avec elle d’une manière respectueuse, comme tous ses collègues officiers de différentes nationalités, qui étaient prisonniers avec elle. Ils la respectaient beaucoup aussi pour sa force de caractère et son patriotisme. Elle fut libérée avant la fin de la guerre en 1917. Il est vrai, que la situation révolutionnaire en Russie rendait ce pays instable. Elle rentrera en Ukraine comme tant d’autres prisonniers libérés, en faisant un détour par la Russie, la Finlande et l’Allemagne. En Ukraine, elle se met au service du nouvel état ukrainien indépendant. Elle participa à l’indépendance de l’Ukraine occidentale, proclamé le premier novembre 1918. D’abord engagée dans l’armée galicienne ukrainienne (Ukrainska Halytska Armija), puis après la réunification de toute l’Ukraine comme attachée diplomatique auprès du gouvernement ukrainien. Partie pour Vienne en 1919, c’est là qu’elle termine ses études en obtenant un doctorat sur le thème historique consacré à la Rus’.

Après la guerre, elle s’établit dans la partie de l’Ukraine occupée par la Pologne, la Galicie.Elle se maria avec Roman Dachkevitch qui était général de l’armée ukrainienne. Tout en apportant son soutien au mouvement ukrainien dont un des responsables fut le colonel Evhen Konovaletz (UVO) /Ukraijinska Vijslova Organizatsia/. Cette organisation était faite pour la plupart, par des personnes issues de l’armée ukrainienne créé pendant la période de l'indépendance, et aussi de jeunes étudiants qui se battaient contre l’occupation de la Pologne, elle donnera par la suite, l’organisation des nationalistes ukrainiens(OUN). Toutefois, Oléna ne deviendra pas membre, ni de l’UVO, ni de l’OUN. Elle s’éloignera de l’activité politique militante proprement dite pour se consacrer à l’enseignement universitaire, notamment l’histoire et la géographie,et par la même occasion, elle deviendra par contre, membre de la Société Scientifique Chevtchenko évoquée ci-dessus.

La politique la rattrapera. En effet, après la seconde guerre mondiale elle sera arrêtée pour son activité militante passée, et écopera 10 ans de Goulag. De même, son fils l’historien Yaroslav Dachkevitch sera aussi emprisonné dans le goulag. Libérée en 1956 pour raison de maladie, elle retournera à Lviv. Elle se consacrera jusqu’à la fin de ses jours à l’enseignement de la géographie, et décédera le 11 juillet 1963. Son enterrement au cimetière de Litchakiv (le Père-Lachaise de Lviv), rassembla une foule nombreuse, et se transforma en manifestation d’hommage à cette grande ukrainienne.

Son choix de rester en Ukraine malgré l’occupation soviétique alors que beaucoup émigrèrent, suscita l’admiration de nombreux ukrainiens. En même temps, on peut s’interroger sur le fait que Oléna dans les années vingt, abandonna la vie politique militante pour se consacrer à l’enseignement universitaire. Elle est ni la première, ni dernière dans ce cas là… En tout cas, des femmes en Ukraine comme elle, il y en a eu un certain nombre.Elles ont beaucoup compté dans l’Histoire pour l’édification d’un état ukrainien indépendant.

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