Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Hommage à Vassyl Stouss.

par Bogdan Mytrowytch

Le 5 septembre comme chaque année, l’Ukraine a commémoré la mort d’un grand poète ukrainien du nom de Vassyl Stouss.

Vassyl, fut il y a trente ans quasiment assassiné en 1985 par l’administration du camp de Perm en Sibérie. Il purgeait sa peine de 10 ans, puis devait faire 5 ans de relégation. Cela s'est fait suite à un simulacre de procès, ayant en plus « un avocat commis d’office » comme Victor Medvechuk…(oui, oui le même qui représente l’Ukraine aux accords de Minsk), qui était à l’unisson avec le procureur, qui l’a condamné…En fait, la vrai raison de sa condamnation : c'est de ne pas être un écrivain servile du régime soviétique. En 1965, il montre sa résistance au régime lors de la projection à Kyiv du film de Serge Paradjanov «les chevaux de feu" Il monte à la tribune avec d’autres amis à la fin de la séance pour dénoncer l’arrestation des écrivains ukrainiens. « La goutte d’eau » pour lui, ce fut l’arrestation de son ami le dissident Ivan Svytlychny. Voyons le cheminement, qui conduisit ce poète à devenir un grand dissident.

Vassyl est né le 7 janvier 1938 dans la région de Vinnitsa, mais a grandi et vécut avec sa famille dans la région du Donbass, dans la ville de Stalino, qui s’appelle aujourd’hui Donetsk…tout un programme !

Pour l’anecdote, la maman de Vassyl a eu peur d’inscrire sa date de naissance, et elle en a mis le 8 janvier, pourquoi ?...Elle avait peur que les autorités soviétiques lui causent des ennuis… En effet, le 7 janvier correspond au Noel Orthodoxe qui est fêté pour la naissance du Christ…En plus, vivant dans une région ultra soviétisée avec la ville du nom de Stalino… On comprend pourquoi Vassyl face à une telle pression sur sa famille et lui-même, depuis la tendre enfance, s’est révolté contre cet état de choses !

A partir de 1963 il devient doctorant à l’institut Taras Chevtchenko à Kyiv, il y prépare un doctorat, mais l’acte courageux accompli, lors de la projection du film de Paradjanov en 1965, passe mal très mal aux yeux des autorités…il est renvoyé de l’université Chevtchenko, son doctorat à thématique devait être littéraire, en même temps il se voulait psychologique, il analysait « Les sources du caractère affectif de l’oeuvre littéraire », tel était son titre. Il aime beaucoup les écrivains tels que Albert Camus, Marcel Proust, Boris Pasternak et Kipling Faulkner, Goethe, Rilke… et il traduisit certains d’entre eux… Certaines poésies sont regroupées dans un recueil appelé « La Route de la Douleur ». Des œuvres poétiques regroupées dans « les Palimpsestes » en sont les plus connus, ils furent retransmis en Occident grâce à la femme d’un dissident lituanien enfermé avec lui : Balys Gajauskas. Une autre femme, Nadija Svitlytchna, une dissidente ukrainienne réfugiée aux Etats-Unis les publia.

A partir de 1965 jusqu’à 1985, ce dissident combattra sans relâche le système totalitaire. Le 12 janvier 1972 Vassyl est arrêté la première fois, il est condamné à 5 ans de prison qu’il purge à Magadane en Sibérie, il revient vers 1979 à Kyiv, mais son état physique est déjà détérioré. Comme beaucoup d’autres dissidents Il est arrêté une seconde fois en 1980, c’est là qu’il est condamné à 10 ans de camps et 5ans d’exil. En cause : ces lettres écrites au dissident russe André Sakharov, et aux dissidents ukrainiens Levko Loukianenko et Petro Hryhorenko plus ses poésies sont considérées comme » de la propagande anti-soviétiques ».

Dans la zone de Koutchtno, du camps de Perm, Vassyl Stouss tient tête à l’administration, il les traite comme » des auxiliaires d’un régime criminel ». Les matons se vengent en l’enfermant souvent dans une cellule d’isolement. Sa famille pourra le voir la dernière fois qu’en 1981 pour une durée de 23 heures. Sa santé fragile ne cesse de défaillir, et c’est ce qui le conduira à la mort le 5 septembre 1985. Il a été vu par un maton en train de lire un livre la nuit, il sera alors enfermé dans une cellule d’isolement, cette nuit sera fatale pour lui, on le voit gisant par terre, mais l’administration sciemment ne fait pas intervenir le médecin tout de suite…elle laisse traîner les choses…sa mort est constatée le matin. Officiellement il est mort de crise cardiaque, il fut enterré dans le camp, et le restera là-bas jusqu’en 1989. En 1989, son corps est rapatrié en Ukraine, il est enterré aujourd'hui à Kyiv dans le cimetière de Bajkové, qui est considéré comme « le Père Lachaise ukrainien ».

Certaines personnes diront, que c’est à cause du fait que Vassyl Stouss fut proposé au prix Nobel pour « Son Journal du Camp » que ce quasi-meurtre fut fait. Le prix Nobel ne peut pas être décerné à un mort, elle doit l’être lors du vivant de la personne… Enfin, le 26 novembre 2005, le président V.Youchtchenko lui a décerné le titre posthume" de Héros de l’Ukraine"

Aujourd’hui, Donetsk est occupé par les « pro-russes », la plaque de Vassyl Stouss qui ornait l’université a été enlevée… comme a été enlevée Donetsk à l’Ukraine. . En cette période actuelle, qui est cruciale pour le pays, ce dissident incarne l’esprit de résistance, face à l’emprise russe de Poutine. Beaucoup le compare comme « le Chevtchenko du vingtième siècle ». L’esprit critique et sans compromission de Vassyl Stouss, que l'on trouve dans ses écrits, constitue un exemple pour toute la société civile ukrainienne d’aujourd’hui.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article